Bkerkè (Agence Fides) – La reconnaissance internationale de l'Etat de Palestine représente un acte ne pouvant être différé si l'on veut vraiment favoriser le rétablissement de la paix au Proche-Orient et il faut également soutenir et garantir le retour dans leur patrie de tous les réfugiés palestiniens encore dispersés dans la région, ce qui représente pour eux « un droit naturel ». C'est en ces termes que le Patriarche d'Antioche des Maronites, S.Em. le Cardinal Boutros Bechara Rai, a défini la prérogative des palestiniens descendant des populations arabes ayant fui la Palestine après la naissance de l'Etat d'Israël. Ces propos ont été exprimés au siège patriarcal de Bkerkè, le 26 septembre, alors que le Patriarche recevait une large délégation du Comité présidentiel pour les Affaires de l'Eglise en Palestine, conduite par Hanna Amira – membre du Comité exécutif de l'OLP – délégation qui comprenait entre autres également le Conseiller présidentiel Ramzi Khoury, l'Ambassadeur Issa Kassissieh – représentant de l'Etat de Palestine près le Saint-Siège – et le Pr. Vera Baboun, Maire de Bethléem. Le Cardinal a répété que, s'agissant de la question palestinienne, continue à être perpétrée « une grave violation de la vérité et de la justice » et que l'absence de reconnaissance de l'oppression subie par le peuple palestinien continue à représenter un facteur objectif de la pérennisation des foyers de guerre dans la région, fragilisant toutes les tentatives visant à construire une paix authentique et durable au Proche-Orient. (GV) (Agence Fides 29/09/2016) |
En Jordanie, un écrivain chrétien a été assassiné
L'écrivain-journaliste Nahed Hattar a été assassiné à Amman alors qu'il devait comparaître devant un tribunal pour avoir publié sur son compte Facebook une caricature moquant Daech et sa vision de Dieu. Bien avant, l'homme suscitait la controverse. Décryptage.
L'écrivain-journaliste Nahed Hattar a été assassiné à Amman alors qu'il devait comparaître devant un tribunal pour avoir publié sur son compte Facebook une caricature moquant Daech et sa vision de Dieu. Bien avant, l'homme suscitait la controverse. Décryptage.
Des manifestants brandissent le portrait de Nahed Hatter, à Fuheis en Jordanie, le 25 septembre 2016. / Khalil Mazraawi/AFP
Les faits
La Jordanie, pays arabe plutôt modéré, n'est pas épargnée par l'extrémisme religieux. C'est ce que démontre l'assassinat dimanche 25 septembre de l'écrivain jordanien Nahed Hattar, 56 ans. Il a été tué alors qu'il montait les marches d'un tribunal d'Amman où il était jugé pour avoir publié une caricature considérée comme offensante envers l'islam. Gravement blessé à la tête, il est décédé à l'hôpital.
Selon des témoins, l'assassin présumé, un homme barbu, portant une thobe (tunique traditionnelle) de couleur grise a tiré sur la victime avant de se rendre aux policiers présents devant le tribunal.
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De religion chrétienne, le chroniqueur avait été arrêté le 13 août après avoir relayé sur son compte Facebook une caricature – dont l'auteur est inconnu – montrant un djihadiste barbu sur un lit au paradis entouré de deux femmes s'adressant à Dieu comme à un simple serviteur. Il lui demandait d'apporter un verre de vin et des noix de cajou et lui ordonnait d'amener quelqu'un pour nettoyer la chambre, avant de lui faire remarquer qu'il devait frapper à la porte avant d'entrer.
La caricature avait pour titre : « Dieu des Dawaech », en allusion aux djihadistes de Daech. Mais au vu des réactions violentes sur les réseaux sociaux, l'écrivain avait retiré la caricature peu de temps après, tout en expliquant « qu'elle moquait les terroristes et leur conception de dieu et du paradis. Elle ne porte en aucun cas atteinte à la divinité de dieu. »
Nahed Hattar avait cependant été accusé par les autorités jordaniennes d'« incitation aux dissensions confessionnelles » et d'« insulte » à l'égard de l'islam, qui interdit toute représentation de Dieu.
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Qui est Nahed Hattar ?
L'écrivain assassiné était un opposant de gauche au régime jordanien, connu aussi pour son soutien au régime syrien de Bachar Al Assad. Après son arrestation en août, il avait été libéré début septembre sous caution et le procureur général avait imposé un black-out sur cette affaire. Ce n'était pas la première fois que Nahed Hattar avait maille à partir avec la justice. Il avait déjà été emprisonné dans le passé pour avoir critiqué le roi de Jordanie, dans des articles publiés sur Internet.
Peu après la publication de la caricature sur le Web, le journaliste avait été violemment pris à partie pour son athéisme, alors qu'il est chrétien.
Dans une région où les tensions religieuses sont exacerbées, la Jordanie est un pays où les chrétiens sont bien intégrés et où la liberté de culte est assurée. Par ailleurs, le royaume se veut à la pointe du dialogue islamo-chrétien.
Les chrétiens jordaniens seraient entre 3,5 à 4 % de la population du royaume. Ils disposent de neuf sièges réservés, sur 80, au Parlement. Deux chrétiens sont appointés par le roi pour siéger au Sénat. Nombre d'entre eux occupent des postes de ministres, depuis 1947.
Ils sont essentiellement établis à Amman, Salt (nord) et Madaba (sud), où une université catholique a ouvert ses portes en 2011. Une communauté ancienne subsiste également à Karak. Au nord, Shatana est un village intégralement catholique.
Un assassinat plutôt motivé par des raisons politiques
Nahed Hattar était un personnage très controversé en Jordanie. Selon l'écrivain Fahad al Khitan, interrogé sur la télévision qatarienne Al Jazeera juste après son arrestation en août, ses adversaires auraient profité de l'affaire de la caricature « pour se venger de ses déclarations politiques souvent offensantes et controversées. »
En effet, il affichait ouvertement ses sympathies pour le président syrien Al Assad et décrivait ceux qui critiquaient le gouvernement syrien de « terroristes » ou de « sympathisants terroristes ».
Plus grave, il se faisait le porte-parole de ceux qui veulent priver les Jordaniens d'origine palestinienne de leurs droits légaux et civiques en Jordanie – la population d'origine palestinienne représente près de 70 % de la population du pays. Hussein de Jordanie – père de l'actuel roi Abdallah –, aura été le seul dirigeant arabe à accorder la nationalité de son pays aux Palestiniens. Nahed Hattar se faisait l'avocat d'une citoyenneté jordanienne exclusive, sans sa composante palestinienne.
Agnès Rotivel