Nadia Blétry (au Caire) et Céline Hoyeau , le 07/01/2018 à 18h05
Mis à jour le 07/01/2018 à 18h2
Le patriarche copte-orthodoxe Tawadros II et le président égyptien Al Sissi ont inauguré samedi 6 janvier dans la soirée une nouvelle cathédrale, au Caire.
Ce geste symbolique en faveur des coptes ne doit pas cacher l’épineuse question des lieux de culte chrétiens, qui perdure dans certaines régions du pays
Au milieu des youyous de joie et des « Nous vous aimons » criés par les fidèles, le président égyptien Abdel Fattah Al Sissi s’est avancé jusqu’à l’autel, samedi 6 janvier, aux côtés du patriarche copte-orthodoxe Tawadros II, pour la messe de Noël, célébrée ce week-end selon la tradition orientale.
Une célébration très particulière, puisqu’il s’agissait aussi de l’inauguration de la nouvelle cathédrale de la Nativité du Christ, offerte aux coptes par le gouvernement dans la nouvelle capitale administrative actuellement en construction à l’est du Caire.
À cette occasion, d’importantes forces de sécurité avaient été déployées autour de cet édifice gigantesque mais aussi à travers le pays pour prévenir tout risque d’attentat dans les églises. « Nous vous aimons aussi, a répondu le président Al Sissi. Nous sommes une seule famille, vous faites partie du pays et personne ne creusera de fossé entre nous. »
Toujours des pressions d’extrémistes musulmans
Néanmoins, derrière ce geste symbolique, la question des lieux de culte coptes reste compliquée. Le chef de l’État a multiplié les gestes à l’égard des coptes qui se sentaient marginalisés. Avec notamment la promulgation, en 2016, d’une loi facilitant la construction, la restauration ou la régularisation des églises.
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Mais dans certaines régions, les restrictions ont toujours cours et, ces derniers mois, des édifices ont encore été fermés sous la pression d’extrémistes musulmans. « Au sommet de l’État, il y a une volonté politique claire d’intégrer les coptes, mais il faudra encore du temps pour que changent les mentalités », analyse Anis Salama, jeune copte-orthodoxe, très investi dans l’œcuménisme.
Dernier incident en date, le mois dernier : l’attaque d’une église à Gizeh, au sud du Caire, par des manifestants qui reprochaient l’absence de permis. De fait, cette église n’a toujours pas obtenu de licence depuis sa construction il y a quinze ans. Les lieux de culte sans autorisation sont nombreux en Égypte et, dans les faits, tolérés par les autorités jusqu’à ce qu’ils soient dénoncés par des citoyens. Le diocèse a, du reste, soutenu avoir cherché à légaliser son statut en vertu de la nouvelle loi. Sans succès.
Quatre églises fermées le mois dernier
En cause, des lourdeurs administratives dues, très probablement, aux peurs nourries par les protestations de musulmans extrémistes. Dans certaines régions, notamment en Haute-Égypte, les forces de l’ordre ont du mal à ne pas céder aux pressions de familles qui font la loi dans les villages. Au mois d’octobre dernier, quatre églises sans permis ont été fermées par la police dans la région de Minya.
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Les responsables chrétiens locaux se sont indignés dans un communiqué que les coptes soient doublement victimes : « Les criminels ne sont pas punis alors que les chrétiens le sont, puisque la première option consiste à fermer leurs églises. »
Mgr Anba Makarios, évêque copte-catholique de Minya, en a appelé aux autorités : « Si les églises ne rouvrent pas, ce n’est pas parce qu’elles sont informelles, mais parce que la loi fait défaut et que les extrémistes imposent leur vue. »
La loi de 2016 inefficace
La loi adoptée en 2016 devait simplifier les procédures administratives. Mais pour Ishak Ibrahim, chercheur au sein de l’ONG Egyptian Initiative for Personal Rights (EIPR), elle « n’a pas fait ses preuves » à ce jour : « Depuis son adoption, aucun communiqué officiel n’a fait part de la construction de nouveaux lieux de culte. En revanche, on dénombre une vingtaine d’incidents et des fermetures d’églises à répétition. »
Mgr Makarios va plus loin : « Elle n’a pas résolu le problème, elle l’a même aggravé. Elle sert parfois à légitimer la fermeture d’églises, car elle est imprécise et comprend trop de restrictions : par exemple en imposant que les églises soient construites dans les villes et non dans les villages. »
Les coptes-orthodoxes n’ont que 6 000 églises dans le pays, alors qu’ils représenteraient environ 10 % des 95 millions d’Égyptiens.
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La plus grande église orthodoxe du Moyen-Orient
En janvier 2017, le président Al Sissi a lancé la construction de la plus grande mosquée et de la plus grande église du pays dans la nouvelle capitale administrative en construction, à l’est du Caire, comme « symboles de coexistence et d’unité nationale ».
Inaugurée samedi, cette nouvelle cathédrale de la Nativité du Christ est la plus grande église orthodoxe du Moyen-Orient. Elle peut accueillir 9 000 personnes.
Les coptes ont encore été victimes d’attaques au long de l’année 2017. Dernière en date, celle du 29 décembre contre une église du sud du Caire, qui a fait neuf morts.
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