ASIE/SYRIE - Libération du Père Jacques Mourad, près de cinq mois après son enlèvement
Homs (Agence Fides) – « Nous sommes reconnaissants au Seigneur et nous rendons grâce à Dieu miséricordieux pour ce don. Et il nous tient à coeur de remercier tous les amis de par le monde qui priaient pour Jacques et pour notre communauté monastique, chrétiens, musulmans ou autres, tout comme ceux qui ne croient pas ou croient différemment pour leur solidarité et leur proximité ». C'est ainsi que le Père Jihad Youssef, moine syrien de la communauté monastique de Deir Mar Musa, relate à l'Agence Fides la joie et la gratitude de tous les moines et moniales de la communauté suite à la libération du Père Jacques Mourad, prêtre syrien lui aussi membre de cette communauté monastique et Prieur du monastère syro-catholique de Qaryatayn. « Nous demandons les prières et la solidarité de tout homme et femme de bonne volonté pour la paix en Syrie et de par le monde – ajoute le Père Youssef – et en particulier pour toutes les personnes enlevées ou disparues ».
Le Père Jacques Mourad, prêtre syrien, a retrouvé sa pleine liberté hier, Dimanche 11 octobre, après que des hommes armés l'aient enlevé le 21 mai dernier au monastère syro-catholique de Qaryatayn – à 60 Km au sud-est d'Homs – dont il était le Prieur. Selon les nouvelles diffusées par des sources locales, le prêtre est en bonne santé et a célébré hier la Messe dominicale à Zaydal, localité du sud-est d'Homs.
Le Père Mourad fait partie de la communauté monastique de Deir Mar Musa, fondée par le Père Paolo Dall'Oglio, SI, disparu dans le nord de la Syrie le 29 juillet 2013 alors qu'il se trouvait à Raqqa, place forte des djihadistes du prétendu « Etat islamique ».
Le monastère de Saint Elie, sis à la périphérie de Quaryatayn, avait représenté, au cours des années de conflit, une oasis de paix et d'accueil au cœur d'une zone de guerre. Le Père Mourad, en compagnie d'un avocat sunnite, avait joué le rôle de médiateur afin de garantir que le centre urbain de 35.000 habitants soit épargné pendant de longues périodes par les affrontements entre l'armée syrienne et les militants anti-Assad. Au monastère, avaient également été accueillis des centaines d'évacués, y compris plus de 100 enfants de moins de 10 ans. Le Père Mourad et ses amis avaient pourvu à trouver le nécessaire à leur survie, en recourant notamment à l'aide de donateurs musulmans. En août dernier, cependant, les djihadistes du prétendu « Etat islamique » ont pris le contrôle de la zone, dévastant le monastère. Durant leur offensive au sud-est d'Homs, les djihadistes ont également pris en otage environ 270 personnes, chrétiens et musulmans, de la zone de Qaryatayn. Ces jours der niers, sur les sites djihadistes, avait été diffusé une vidéo montrant également un groupe de chrétiens de Qaryatayn alors qu'ils signaient, devant des membres du prétendu « Etat islamique » le « contrat de paiement » qui leur est imposé par la jizia (« loi de protection ») afin de continuer à vivre dans leurs maisons sur le territoire contrôlé par le prétendu « Etat islamique » (voir Fides 08/10/2015). Des photographies de cette assemblée, tenue dans une salle de conférence, avaient déjà été diffusées fin août. Tant dans la vidéo que dans les photographies, on pouvait voir la figure du Père Mourad dans l'assemblée. (GV) (Agence Fides 12/10/2015)
Irak : l'évêque de Mossoul appelle à un accueil groupé des déplacés chrétiens
Au lieu d'accorder des visas au compte-gouttes, Mgr Petrus Mouché appelle l'Occident à accueillir plusieurs centaines de familles chrétiennes ensemble, afin d'éviter la dissolution de sa communauté.
«Si on continue à se disperser, notre communauté va disparaître», avertit Monseigneur Petrus Mouché, archevêque syriaque catholique de Mossoul. Depuis plusieurs mois, des familles entières de déplacés chrétiens partent quotidiennement d'Erbil vers l'Europe ou les Etats-Unis. Après un an d'exil, leur situation est extrêmement précaire. La perspective de retrouver leurs maisons s'éloigne de jour en jour et ils s'apprêtent à passer leur deuxième hiver dans des camps. «Les familles sont lassées, elles sont de plus en plus nombreuses à partir et c'est une perte inestimable pour nous», explique Mgr Petrus Mouché qui fait les comptes: «Mon diocèse compte aujourd'hui 12.000 familles, soit environ 50.000 personnes. C'est quasiment un tiers de tous les syriaques catholiques. Donc si on continue à se disperser, c'est notre peuple qui va disparaître.»
Pour stopper l'hémorragie, Mgr Mouché défend aujourd'hui une solution radicale: «Il ne faut plus que vos gouvernements accueillent nos familles au compte-goutte. Quitte à partir, il faut leur permettre de le faire ensemble, à 400 ou 500 familles en même temps. Regroupés, ils seront plus forts, leurs enfants seront scolarisés ensemble, ils pourront continuer à parler leur langue et vivre leur foi.» Cette solution sonne comme un revirement, alors que l'évêque de Mossoul et de Qaraqosh plaidait jusqu'ici uniquement pour le maintien de ses fidèles en Irak, en y créant les conditions favorables. Mais l'objectif reste le même: permettre, à terme, le retour des familles dans leurs villages, actuellement sous le contrôle de Daech. «Une fois leurs villages libérés, ils voudront rentrer chez eux», assure Mgr Mouché. L'évêque défend aujourd'hui son idée dans tous ses déplacements à l'étranger. «Vous avez des villages vides en France. Accueillez-nous le temps que les nôtres soient libérés», a-t-il fait valoir cette semaine au quai d'Orsay. Auparavant, il s'est exprimé en ce sens devant le parlement allemand, au Canada... En République tchèque, le premier ministre se serait engagé à prendre 400 personnes, selon Mgr mouché qui tempère: «Rien n'est acté pour l'instant.»
En 1989, la France accueillait 330 réfugiés kurdes en Auvergne
En France, le président de l'Oeuvre d'Orient se montre réservé sur l'opportunité d'une telle initiative. Mais Monseigneur Pascal Gollnish reconnaît qu'il est «essentiel que les réfugiés syriaques accueillis à l'étranger restent en lien avec leurs coreligionnaires». La prise de Palmyre en Syrie, suivie par la chute de Ramadi a instillé un vrai «sentiment de désespérance chez les déplacés», rappelle Mgr Gollnish. «Mais il est toujours envisageable de reprendre la plaine de Ninive et sécuriser Qaraqosh, ainsi que tous les villages chrétiens aux alentours. C'est la seule et unique solution, si on veut éviter que les derniers chrétiens fuient l'Irak.»
L'idée d'un accueil massif de réfugiés n'est pas neuve en France. En décembre 2007, Bernard Kouchner alors ministre des Affaires étrangères propose un plan radical pour les chaldéens d'Irak. Le ministre de Nicolas Sarkozy envisage très sérieusement un «plan d'accueil des ressortissants irakiens de confession chrétienne». Il s'agit alors de faciliter l'installation de «plusieurs centaines» d'entre eux en France. L'idée sera finalement abandonnée. Elle se heurte à la politique de maîtrise des flux migratoires, mais aussi à l'opposition d'associations et ONG catholiques qui alertent sur les effets pervers d'une telle initiative. Quelques années plus tôt, la France ouvrait ses portes à plusieurs centaines de réfugiés kurdes.
En 1989, au plus fort de la répression baasiste contre les kurdes, Danielle Mitterrand alerte la communauté internationale sur leur sort et se rend auprès d'eux. Son initiative permettra l'accueil de 600 à 700 Kurdes sur le sol français. Parmi eux, plus de 330 sont installés sur la base militaire de Bourg-Lastic, en Auvergne. Sur place, ils effectuent leurs démarches pour obtenir le statut de réfugié, apprennent le français... Puis ils seront répartis dans plusieurs villages aux alentours où ils vivent toujours aujourd'hui.