AFRIQUE/EGYPTE - Annonce de la construction de la plus grande église de la nation de la part du Président égyptien Le Caire (Agence Fides) – Il s'agira de l'église copte (orthodoxe NDT) la plus grande d'Egypte et elle sera inauguré d'ici 2018, dans la nouvelle capitale, qui commence à s'ériger aux marges de la métropole du Caire. L'un de ses financeurs sera le Président égyptien, Abdel Fattah al Sisi. L'annonce du projet a été faite par le Chef de l'Etat à l'occasion de sa participation à la liturgie de Noël en la Cathédrale copte orthodoxe du Caire, célébrée par le Patriarche Tawadros II.
Le Président égyptien a indiqué avoir destiné 100.000 livres égyptiennes (soit environ 5.200 €uros) au premier financement de l'initiative, qui prévoit la construction simultanée de la plus grande mosquée et de la plus grande église d'Egypte à l'intérieur du projet urbanistique ambitieux destiné à créer ex nihilo une nouvelle ville, dans laquelle seront concentrés également les bureaux du gouvernement et les sièges des institutions politiques. Au cours de son intervention – reportent les moyens de communication égyptien – le Chef de l'Etat a confirmé également l'engagement pris concernant la reconstruction de toutes les églises endommagées ou détruites au cours de l'été 2013, au cours des désordres ayant fait suite à la déposition du Président islamiste Mohammed Morsi.
La participation de cette année du Président al Sisi à la Messe de Noël en la Cathédrale copte orthodoxe a été la troisième du genre de sa part. Avant lui, aucun Chef de l'Etat égyptien n'avait pris part personnellement à la célébration de solennités chrétiennes. (GV) (Agence Fides 09/01/2017)
Un point d'histoire : le Sandjak d'Alexandrette
Si l'on regarde attentivement une carte de la Syrie, on s'aperçoit que dans sa partie Nord-Ouest sa frontière avec la Turquie subit un brusque décroché vers le sud. Cela ampute donc une partie non négligeable du territoire syrien au profit de la Turquie.
Cette enclave turque a une histoire et un nom : le Sandjak d'Alexandrette.
Il faut remonter au mandat français pour comprendre ce qui s'est passé. Au lendemain de la première guerre mondiale, les alliés confient à la France un mandat pour administrer et développer les territoires de la Syrie et du Liban afin de les amener progressivement à l'indépendance. Les accords Sykes-Picot de 1916 avaient déjà réglé la question de la frontière avec l'Irak dont l'administration est confiée aux Anglais. L'Etat islamique abolira d'ailleurs symboliquement cette frontière en 2015 pour montrer que le califat a une vocation universelle.
Pour exercer ce mandat, la France nomme en 1920 le général Gouraud Haut Commissaire au Levant (nom englobant la Syrie et le Liban). Le Général Weygand lui succédera en 1923. Pour composer avec tous, ils vont successivement morceler ce territoire en 6 parties : le Liban (dont il proclame l'indépendance symbolique mais qui ne le sera vraiment qu'en 1943), l'Etat de Damas, l'Etat d'Alep, le Territoire autonome des Alaouites (d'où est issue la famille Assad), le Djebel Druze et le Sandjak d'Alexandrette.
Le Général Weygand justifiera cette décision dans ses mémoires : »Pourquoi pas un seul Etat dans lequel on eût réservé au Liban un statut ? C'est que les Libanais refusèrent catégoriquement le maintien d'une servitude dont ils avaient souffert dans le passé; que le pays d'Alep, habitué par les débouchés de son commerce à regarder vers le nord ne tenait pas à lier son sort à celui de Damas; qu'enfin les Alaouites exprimèrent sans détour leur volonté de jouir de l'autonomie sous la protection de la France. Il apparut alors plus avantageux de reconnaître ces autonomies. »
Le Sandjak d'Alexandrette relève d'une autre logique, nettement plus discutable : il faut négocier avec les Turcs après qu'ils nous aient repoussés de Cilicie sous l'impulsion de Mustapha Kémal dont l'armée se rapproche alors dangereusement d'Alep. Or une importante minorité turque vit dans ce sandjak (mot qui signifie subdivision administrative) où elle cohabite avec des turqmènes, des arabes sunnites, des alaouites et des chrétiens dont beaucoup d'Arméniens qui ont fui les persécution turques et se sont mis sous la protection de la France.
La capitale en est Alexandrette (fondée par Alexandre le grand), port important à l'époque, et la ville emblématique Antioche, plusieurs fois détruites au cours de son histoire mais dont le passé romain et chrétien est unique (Saint Luc était originaire d'Antioche). Elle s'appelle aujourd'hui Antakya.
Mustapha Kémal va tomber amoureux de cette région verte et vallonnée baignée par l'Oronte et veut l'annexer à la Turquie. Pendant des années il va organiser l'implantation de milliers de turcs afin de les rendre majoritaires.
En 1936, Ankara devient plus pressante. En effet, le nouveau gouvernement français du Front Populaire signe un traité avec la Syrie organisant la marche vers l'indépendance. Paris cède en outre sur deux points essentiels pour les Syriens : les territoires druzes et alaouites feront partie de la future Syrie.
Les Turcs sont inquiets de l'apparition programmé de ce nouvel Etat et saisissent l'occasion pour exiger une concession sur le Sandjak d'Alexandrette. La France cède, en échange de la neutralité de la Turquie en cas de guerre avec l'Allemagne. Un accord est signé en 1938 et les troupes turques pénètrent aussitôt dans le sandjak. Un referendum est organisé, des milliers de nouveaux électeurs turcs s'installent (de force pour beaucoup d'ailleurs) et le sandjak est officiellement rattaché à la Turquie.
Pour les Arméniens, un nouvel exode commence et la plupart s'installent au Liban. Les Arabes sunnites s'en vont également pour rejoindre Alep notamment. Seuls restent les Alaouites, car la plupart sont ouvriers agricoles et sont indispensables aux nouveaux dirigeants turcs qui ne les laisseront pas partir.
C'est ainsi qu'Antioche est devenue turque et ce n'est pas à l'honneur de la France. Pour la Syrie c'est une spoliation qui n'a jamais été acceptée.
Antoine de Lacoste