Chrétiens d'Orient: un si pieux mensonge
Terrible sort que celui de ces chrétiens d'Irak ou de Syrie, abandonnés face à la cruauté djihadiste, mais aussi instrumentalisés par des dictateurs qui se prétendent leurs protecteurs.
La double peine, à perpétuité. Destin funeste que celui des chrétiens d'Orient, menacés d'extinction et deux fois victimes. Victimes de l'apathie des puissances occidentales, qui, par calcul ou par veulerie, les ont abandonnés à leur sort, donc à leurs bourreaux, de la Haute-Egypte à l'Irak via la Palestine; quitte à avaliser l'anachronisme inepte selon lequel les disciples du Christ constitueraient jusqu'en Mésopotamie, berceau de leur foi, un corps étranger, voire une anomalie postcoloniale.
Victimes aussi de l'instrumentalisation de leur instinct de survie, qu'elle soit orchestrée par des despotes prompts à revêtir la toge de protecteur des minorités confessionnelles face au fléau djihadiste, ou relayée béatement par des militants européens et nord-américains chez qui la sincérité le dispute à la candeur. Nul doute que la mansuétude de François Fillon envers l'abject régime de Bachar al-Assad doit moins à sa russophilie qu'à cette illusion lyrique.
Nul doute que les plaidoyers du catho sarthois en faveur des frères et soeurs persécutés auront, à l'heure de la primaire, grossi les rangs de ses fidèles, au-delà du noyau des zélotes de Sens commun. Mais il y a un hic: la thèse du rempart contre les barbus procède d'une imposture. Elle a beaucoup servi sous l'Irakien Saddam Hussein, légataire d'une idéologie baasiste réputée laïque, et bienfaiteur supposé des Chaldéens.
Encore fallut-il, à l'orée du millénaire, feindre d'ignorer l'embardée islamiste du tyran moustachu, que refléta notamment l'adjonction, entre les étoiles du drapeau national, de l'incantation rituelle "Allahou Akbar". Otages de cette dérive, les chrétiens d'Irak subirent en outre l'impact désastreux du raccourci de George W. Bush, enclin à revendiquer la dignité de "nouveau croisé".
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Pour eux, un sceau d'infamie biface: au recto, collabos des "koufar" (infidèles); au verso, supplétifs du satrape sunnite. En Syrie, même motif, même punition. Héritier d'un clan dynastique minoritaire, Assad Junior y cultive avec un implacable cynisme son image de parrain des lointains cousins du Livre; lui qui a certes choyé l'épiscopat local, mais aussi libéré de ses geôles maints fantassins du djihad.
Bagdad, Damas: dans les deux cas, les fils de la Bible se voient relégués au rang de variables d'ajustement géopolitique et culturelle. Et astreints à une "dhimmitude" laïcisée. En clair, ils paient au prix fort - celui d'une forme de soumission - la protection que leur octroie le pouvoir. Pour qui prie Issa (Jésus), l'étreinte du raïs est l'autre nom du baiser de la mort lente.
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