Des musulmans attaquent une église copte dans le sud de l'Égypte
Des musulmans de Kom Ombo, dans le sud de l'Égypte, ont attaqué une église copte à coups de cocktails Molotov et de pierres.
La Croix-3/3/2013
L'arrivée au pouvoir des Frères musulmans, au Caire, ne contribue pas à apaiser les tensions latentes entre communautés
La police égyptienne a fait usage de gaz lacrymogène vendredi 1er mars pour disperser des musulmans qui manifestaient devant une église, après des rumeurs selon lesquelles une femme convertie au christianisme se cachait à l'intérieur.
Les événements avaient débuté le soir du jeudi 28 février, lorsque des centaines de personnes ont tenté de s'introduire dans l'église. La police a alors fait usage de gaz lacrymogènes. Selon le quotidien gouvernemental Al-Ahram, elle aurait également provisoirement refusé de laisser les fidèles quitter l'église pour éviter des affrontements entre chrétiens et musulmans.
Situé à 165 kilomètres au sud de Louxor et à 40 kilomètres au nord d'Assouan, Kom Ombo est une localité de Haute-Égypte connue pour abriter l'un des temples égyptiens les mieux conservés, le temple de Sobek et Haroëris, datant de la période ptolémaïque. De nombreux chrétiens vivent dans cette partie très rurale du pays.
Des incidents du type de Kom Ombo, liés à des rumeurs sur des conversions ou à la construction de nouvelles églises, sont fréquents en Égypte et ont parfois dégénéré en affrontements meurtriers. Le plus sanglant remonte au 6 janvier 2010. Six coptes et un policier musulman avaient alors été tués à Nagaa Hamadi en Haute-Égypte à la sortie de la messe de Noël.
DES ATTAQUES QUI SE MULTIPLIENT
Les attaques se sont multipliées depuis la révolution de janvier 2011, la chute du président Hosni Moubarak en février 2011, aggravant chez les Coptes un sentiment d'insécurité malgré les assurances des autorités, et notamment du président égyptien Mohamed Morsi, issu du mouvement islamiste des Frères musulmans, qui, élu en juin 2012, avait promis d'être « le président de tous les Égyptiens », sans distinction de religion.
Soucieux de rassurer les chrétiens, le président Morsi avait félicité le pape copte Tawadros II, élu le 4 novembre 2012. De même, le parti Justice et la Liberté, branche politique des Frères musulmans, s'était dit prêt à coopérer avec lui pour « répandre la bonne morale et mettre l'accent sur les valeurs de liberté, de justice et d'égalité ».
Depuis le début de l'année, plusieurs incidents ont ainsi opposé coptes et musulmans. Le 18 janvier, plusieurs dizaines de musulmans en colère ont ainsi tenté de prendre d'assaut une église copte de Qena (sud) après avoir affirmé qu'un commerçant copte avait tenté d'abuser sexuellement d'une fillette musulmane de six ans.
Le 16 février, un leader salafiste avait incité la foule à jeter des pierres contre l'église Saint-Georges de Sarsena, à Tamiya, dans la province égyptienne du Fayoum, à environ 103 km au sud-ouest du Caire. Les assaillants y avaient ensuite mis le feu, détruisant la croix chrétienne au sommet de l'édifice et la plupart des icônes qui s'y trouvaient. Les islamistes auraient estimé que la construction de l'église copte, construite dans les années 1980 et fréquentée par environ 200 familles coptes, était illégale, car trop proche d'une zone habitée par des musulmans.
LES COPTES VEULENT PRENDRE « UNE PART ACTIVE » AU DIALOGUE NATIONAL
Selon l'évêque Youannes, responsable de l'action sociale de l'Église copte-orthodoxe, sur les 83 millions d'Égyptiens, 15 millions seraient des coptes. Ce chiffre est très largement supérieur aux 6 millions déclarés par le gouvernement égyptien, en l'absence de tout recensement impartial. Mais il est plus proche des chiffres avancés ces dernières par plusieurs chercheurs coptes qui se fondent sur les registres de baptême.
Les coptes forment « une minorité, au sens numérique du terme, mais nous ne sommes pas de moindre valeur, au regard de notre histoire, de notre rôle et de l'amour que nous portons à notre nation », rappelait le mardi 5 février le pape copte-orthodoxe Tawadros II, avant de préciser que les chrétiens avaient l'intention de prendre « une part active » à tout dialogue national « qui leur paraîtra bénéfique pour la nation ».
Martine de Sauto (avec AFP)
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