L'apport séculaire des chrétiens à la civilisation
Anita Bourdin
ROME, 26 novembre 2014 (Zenit.org) - M. Michel Sleiman, 66 ans, catholique maronite, président du Liban de 2008 à 2014, a été fait Chevalier de la Grand-Croix de l'ordre de Pie IX "pour son engagement personnel pour la paix et l'intégration, surtout pendant son mandat comme président du Liban", rapporte L'Osservatore Romano.
La cérémonie a eu lieu lundi, 24 novembre 2014, au Vatican, en présence du cardinal secrétaire d'Etat Pietro Parolin, pour qui cette reconnaissance constitue un "appel profond lancé à tout protagoniste de la vie politique, économique, sociale, à travailler pour la paix et la sécurité, en faisant du bien commun l'un des critères déterminants de toute décision, et tout choix concernant le sort des peuples".
Le cardinal Parolin a assuré le président de sa prière pour que Dieu accorde aux Libanais le don d'être des artisans de fraternité et que leur pays deviennent ainsi une oasis de paix dans laquelle tout citoyen "puisse se réaliser pleinement".
Dans son discours, M. Sleiman a pour sa part évoqué les problèmes du Liban et sa vocation, la montée des extrémistes et les souffrances des chrétiens, rapporte L'Orient-le Jour.
Il a dit sa gratitude: « Je ne vous remercierai assez, Éminence, de l'honneur que vous me faites en me remettant, au nom de Sa Sainteté le pape François, la distinction de chevalier de la Grand-Croix de l'ordre de Pie IX. J'en ressens de la joie et de l'émotion. Par votre intermédiaire, je voudrais lui adresser ma gratitude et lui exprimer mon filial dévouement ».
N'ayez pas peur
« Cette haute distinction me conforte dans la voie que j'ai choisie et me donne le courage pour le chemin à parcourir encore. Elle me pousse à garder vivace en moi ce cri lancé par saint Jean-Paul II : Non abbiate paura ! « N'ayez pas peur » !« Depuis le jour où les pas du Christ foulèrent notre sol, l'élevant au rang de terre sainte, le Liban est resté fidèle aux promesses de son baptême : terre du dialogue, terre de la nécessité (...). Comment oublier l'admiration de Leurs Saintetés pour le Liban ? Du "Liban-aigle" de Pie XII au "Liban-terre d'élection" de Jean XXIII ; du Liban "pays particulier" de Paul VI au "noble pays" de Jean-Paul Ier; du "Liban-message" de Jean-Paul II au "Liban, exemple... dans le sanctuaire de Dieu" de Benoît XVI, et au "Cher Liban" du pape François... C'est dire combien le Saint-Siège a honoré le double engagement du Liban : celui de mettre en œuvre un système politique fondé sur le principe de convivialité entre chrétiens et musulmans sur la base de l'égalité ; et celui de promouvoir les libertés de conscience, d'opinion et d'expression, ainsi que les autres libertés connues dans les régimes démocratiques. »
« Durant mon mandat, j'ai œuvré, en toute conscience, à éloigner les spectres d'extrémisme et de divisions de ma patrie, jusqu'à l'adoption de la déclaration de Baabda qui a bénéficié du soutien de toutes les composantes libanaises. Tous ont su, ou sauront, qu'elle protège le Liban et tous ses fils. Il y a deux jours, nous avons célébré l'indépendance du Liban. Combien aurais-je souhaité avoir près de moi, en recevant cette honorable distinction, le nouveau président de la République ou son représentant. D'ici, près de la tombe du Prince des apôtres et face à la statue de saint Maron, je renouvelle mon appel à toutes les parties libanaises concernées, et plus particulièrement aux maronites, les invitant à mettre tout intérêt personnel de côté et se résoudre à élire un nouveau chef de l'État dans les plus brefs délais », a déclaré Michel Sleiman.
Il a souligné l'importance des chrétiens au Moyen Orient: : « Le Moyen-Orient est plus qu'une région. C'est une maison commune. En son cœur, les chrétiens sont partie intégrante et ont toujours épousé ses causes justes. Aujourd'hui, ils ne veulent guère davantage que ce qu'ils réclament pour les autres. En contrepartie, ils ne sauraient accepter moins que ce que les autres exigent pour eux-mêmes. »
L'apport séculaire des chrétiens à la civilisation
« Dans le monde arabe, l'avenir des chrétiens ne consiste guère en une protection militaire étrangère. Il n'est pas non plus dans l'identification avec les régimes injustes et autoritaires. Même sur leur croix, leur témoignage ne saurait être qu'en faveur du respect des droits de l'homme, le droit à la liberté de croyance et de culte, et le droit à la participation de toutes les composantes à la gestion de la chose publique commune, compte tenu de l'apport séculaire des chrétiens à la civilisation, et non de leur nombre », a-t-il expliqué.
Et de citer le pape Benoît XVI: « N'est-ce pas cela que stipule l'Exhortation apostolique du pape émérite Benoît XVI, signée au Liban : Ecclesia in Medio Oriente ? Au nom de cette noble mission, en faveur d'un Moyen-Orient et d'un monde plus humains, il est de notre devoir que le Liban continue à faire exister ce qui, sans lui, ne saurait exister »
Il en a appelé à la Communauté internationale pour venir en aide aux réfugiés et au Liban qui les accueille dans une proportion difficile pour la population: « La guerre entamée il y a plus de trois ans en Syrie a submergé le Liban, au-delà de ses capacités d'absorption, par un exode massif de réfugiés qui risque de déstabiliser les structures mêmes du pays. La communauté internationale, avec le soutien du Saint-Siège, est appelée non seulement à y faire face, mais à se mobiliser en vue de leur retour à leur pays ».
Il a fait observer que le terrorisme est étranger à l'islam : « Un intégrisme terroriste, étranger à la religion islamique, a enflammé nos alentours (...). Il a forcé à l'exode des milliers de chrétiens de leur terre natale en Irak et en Syrie. À maintes reprises, il a tenté de menacer l'existence chrétienne au Liban, de déstabiliser l'intégrité de notre pays et de modifier à jamais la face humaniste de notre Orient. »