INTERVIEW - Mohammed Moussaoui, président du Conseil français du culte musulman (CFCM), réagit à la dégradation de l'image de l'islam en France.
LE FIGARO.- Pourquoi l'image de l'islam tend à se dégrader?
Mohammed MOUSSAOUI.- De nombreux amalgames ont attisé des peurs, souvent irrationnelles, de tout ce qui est musulman. Certains associent l'islam à l'immigration et réagissent à la croissance forte d'une population d'origine étrangère.
D'autres se disent convaincus que la présence musulmane en France est le début d'une «invasion» qui sera suivie par une domination d'un système légal basé sur des «valeurs islamiques». Il y a aussi l'image de l'islam renvoyée par les attentats terroristes et les violences commises par des individus se réclamant de lui. L'islam a été sorti de la sphère spirituelle pour devenir un sujet politique.
La construction de mosquées et le port du voile suscitent un rejet massif. De quoi est-il symptomatique?
L'amalgame entretenu entre ces pratiques marginales et la pratique religieuse musulmane nourrit le rejet de tout ce qui est visible en islam. Face à cela, même ceux qui ne revendiquaient pas leur différence culturelle ou cultuelle se trouvent acculés à affirmer l'identité qu'on ne cesse de leur renvoyer.
Voyez-vous un moyen de contrer cette «peur» de l'islam?
Le CFCM, à travers ses imams et cadres religieux, œuvre pour la promotion d'unislam de modération et de juste milieu loin de toute expression extrémiste. Le CFCM œuvre également pour la construction du vivre ensemble.
Le sondage indique que les Français ne veulent pas d'un parti musulman, mais beaucoup d'entre eux ne seraient pas choqués par un maire musulman...
L'organisation politique de la société ne doit pas se faire selon les appartenances religieuses, c'est l'essence même du principe de laïcité. Il est très frappant que les musulmans dans leur immense majorité entretiennent, individuellement, d'excellents rapports avec leur entourage et il n'est donc pas surprenant qu'un citoyen de confession ou de culture musulmane ait la confiance de ses concitoyens.
Voyez-vous un avenir conflictuel ou convivial pour l'islam de France?
Nous assistons à une instrumentalisation politique de la religion musulmane, mais aussi à une action concertée entre les pouvoirs publics et les représentants du culte musulman pour apporter des réponses aux problèmes concrets liés à ce culte.
De son côté, le Conseil français du culte musulman œuvre, par l'intermédiaire de ses imams et de ses cadres religieux, à faire reculer toute pratique qui n'incarne pas ces valeurs. En réalité, l'immense majorité desmusulmans de France aspire à vivre sa spiritualité dans le strict respect des valeurs de la République comme tous les citoyens des autres cultes ou convictions, sans stigmatisation.
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