http://www.lefigaro.fr/international/2016/01/29/01003-20160129ARTFIG00337-la-syrie-verra-t-elle-un-traite-de-paix-avant-la-fin-de-sa-sixieme-annee-de-guerre.php
L'archevêque d'Alep, Monseigneur Jeanbart, est l'un des trois prélats invités par l'Aide à l'Église en détresse (AED), qui organise ce vendredi la nuit des témoins pour défendre la liberté religieuse dans le monde. D'autres personnalités du Pakistan, d'Irak et du Soudan témoignent de la situation dans leur pays.
En mars prochain, la Syrie entrera dans sa sixième année de guerre. Les affrontements ont tué 250.000 personnes et déplacé des millions d'autres. L'économie du pays est détruite, tout comme les infrastructures ou les hôpitaux. Dans ce chaos, les minorités ethniques et religieuses du pays n'ont jamais été autant menacées dans leur existence même. Une réalité que Monseigneur Jean-Clément Jeanbart, archevêque d'Alep, ne cesse de dénoncer à travers le monde. Actuellement en France, le prélat partagera son témoignage ce vendredi 29 janvier à Notre-Dame de Paris. Il parlera aux côtés de sœur Lika Marooki, religieuse dominicaine irakienne, de Monseigneur Joseph Coutts, archevêque de Karachi au Pakistan, et du père Antonio Aurélio Fernandez, prêtre de l'ordre trinitaire au Soudan. À l'invitation de l'Aide à l'église en détresse (AED) tous sont venus témoigner des difficultés qu'ils rencontrent dans leur pays pour vivre leur foi librement. La conférence qui se tient vendredi à Paris est la première d'une longue série qui les emmènera à travers toute la France.
«Pire que les invasions tartares ou mongoles»
Monseigneur Jean-Clément Jeanbart a quitté Alep il y a quatre jours avec la volonté de réveiller les consciences occidentales sur le drame syrien. «Ce qui se passe actuellement est inédit pour la Syrie. C'est bien plus grave que ce que le pays a subi lors des invasions tartares ou mongoles. Avant la guerre, Alep était une ville d'avant-garde, elle était la seconde ville en termes de puissance économique après Constantinople. Aujourd'hui, elle est rasée.» Au passage, l'archevêque grec-melkite catholique d'Alep égratigne la France, qui s'est totalement trompée dans sa lecture du conflit syrien selon lui. «J'aime la France, c'est elle qui m'a éduqué», dit le prélat francophone. «Mais j'ai connu une autre France, une France qui défendait les valeurs de liberté, d'humanité, de laïcité et de respect. Pourquoi agit-elle aujourd'hui par intérêt politique ou financier?» Pour lui, refuser de discuter avec le régime de Bachar el-Assad est une erreur historique. «À choisir, je préfère encore le régime actuel, plutôt que les fondamentalistes qui le combattent», estime-t-il. «Il y va de notre avenir en Syrie, comme de l'avenir de toutes les minorités de la région.» Monseigneur Jeanbart reproche aux médias occidentaux de se faire manipuler par certains médias qui donnent une vision partiale du conflit. «L'OSDH diffuse une information favorable à ceux que vous appelez les rebelles. Al-Jazeera, par l'origine de ses financements, donne également une information systématiquement à charge contre le régime.» Aujourd'hui, Monseigneur Jeanbart craint que l'exode de sa communauté mette fin à 18 siècles de présence chrétienne en Syrie. Il s'agace contre les pays qui favorisent les départs de chrétiens en offrant des facilités de visas ou de moyens d'évacuation. «Vous nous voulez du bien? Alors aidez-nous à rester chez nous», assène-t-il.
Racheter les chrétiens prisonniers des musulmans
À l'image de Monseigneur Jeanbart, trois autres prélats témoigneront à Norte-Dame de Paris de leurs difficultés à pratiquer leur foi dans leur pays d'origine. Depuis plus de deux ans, Sœur Lika Marooki vit telle une réfugiée dans son propre pays, l'Irak. Cette religieuse dominicaine vivait à Qaraqosh depuis l'âge de 10 ans, après avoir fui Bagdad en 1988. Mais elle a pris une nouvelle fois la route de l'exode le 6 août 2014, où elle rejoint Erbil face à l'avancée de l'État islamique. Depuis, elle se consacre à l'assistance aux exilés. Au Soudan, le père Antonio Fernandez s'occupe quant à lui des enfants soudanais chrétiens, vendus par des marchands d'esclaves islamiques. Il appartient à l'ordre trinitaire, vieux de 800 ans, dont le charisme est de racheter les chrétiens prisonniers des musulmans. «Au Nord-Soudan, la dictature islamique impose sa loi. Ceux qui ne professent pas la religion d'État sont considérés comme des choses», explique-t-il. Enfin, le dernier témoin de la soirée sera Monseigneur Joseph Coutts, archevêque de Karachi depuis 2012, il alerte sur la montée de l'intégrisme musulman au Pakistan. Depuis 2010, la loi anti-blasphème dispose que la profanation du Coran ou du prophète Mahomet est punie de mort. «La loi est simple à détourner ; les musulmans fondamentalistes l'invoquent régulièrement contre leurs ennemis. Lorsque c'est le cas, la situation peut vite devenir irrationnelle et des foules fanatisées s'en prennent à notre communauté. Même des blasphèmes commis à l'autre bout du monde peuvent rejaillir sur nous. Et face à cela, notre gouvernement est impuissant.
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