Le voyage du pape en Turquie s'annonce à la fois œcuménique, interreligieux et diplomatique. Œcuménique d'abord puisqu'il répond à une invitation du patriarche de Constantinople, Bartholomeos 1er, pour fêter la Saint-André, apôtre très cher au monde orthodoxe. D'où le choix de fixer autour du 30 novembre cette visite, bien qu'elle arrive tôt pour le nouveau gouvernement turc, en place après la présidentielle du 10 août, et qu'elle suit celle du pape à Strasbourg mardi 25 novembre – un record dans la succession de déplacements hors d'Italie.
Se rendre au Phanar devient de fait une tradition pour tout nouveau pape. François s'inscrit à la suite de Paul VI (1967), de Jean-Paul II (1979) et de Benoît XVI, venu en 2006 à l'occasion de la Saint-André au début de son pontificat, comme son prédécesseur. « La dimension œcuménique avait toutefois été éclipsée par la polémique avec le monde musulman, soulevée par le discours de Ratisbonne qui avait précédé ce voyage », rappelle une source vaticane, estimant que, cette fois, le dialogue œcuménique devrait mieux prévaloir.
La qualité des relations personnelles entre le pape François et Bartholomeos y contribue. « Il existe une estime réciproque entre eux, presque une complicité », observe cette même source. Les deux hommes, de la même génération, se sont déjà rencontrés à Jérusalem, en mai, puis au Vatican, le mois suivant.
Un message de coexistence pacifique entre les religions
Sa visite au patriarche de Constantinople sert aussi à conforter la place de la petite minorité chrétienne dans un pays en très grande majorité musulman. Les rencontres du pape à Ankara avec le président Erdogan et d'autres autorités de la République turque devraient être l'occasion de défendre la liberté religieuse et le dialogue entre confessions. La visite à la Mosquée bleue à Istanbul, où s'était rendu Benoît XVI, reprendra le message de coexistence pacifique entre les religions, que le pape François a déjà appuyé à Jérusalem et lors de sa visite le 21 septembre en Albanie, pays à majorité musulmane où orthodoxes et catholiques ont toute leur place.
Un message d'actualité aussi, au-delà de la Turquie, alors qu'à sa frontière, l'offensive de Daech se poursuit. Au retour de Corée du Sud, en août, le pape avait implicitement toléré les frappes militaires contre cette organisation terroriste, déclarant qu'« il est licite d'arrêter l'agresseur injuste ». Mais au retour de Strasbourg, mardi, il s'est inquiété, sans citer de pays, quand « chaque État, pour son compte, se sent le droit de massacrer les terroristes ». Son voyage en Turquie pourrait servir à borner davantage la position de la diplomatie du Saint-Siège et pousser Ankara à mieux clarifier la sienne. Interprétés comme un soutien aux chrétiens d'Orient, ces trois jours ne prévoient toutefois officiellement aucune rencontre avec des réfugiés d'Irak et de Syrie. La moindre intensité du programme tranche avec la densité de ses précédents déplacements. Mais peut augurer aussi des surprises.
Envoyé de mon Ipad
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