INTERVIEW - De passage à Paris, l'archevêque syriaque catholique de Mossoul, actuellement en exil à Erbil dans le Kurdistan irakien, lance un appel à l'aide à la France.
Depuis huit mois maintenant, Mgr Yohanna Petros Mouché est exilé dans son propre pays. Né en 1943 à Qaraqosh, dans le nord de l'Irak, il a été berger dans sa jeunesse avant d'être ordonné en 1968. Archevêque de Mossoul, de Kirkouk et du Kurdistan depuis 2011, il est actuellement réfugié à Erbil. Il vit auprès de sa communauté, les syriaques catholiques, qui font partie des 130.000 chrétiens irakiens chassés de leurs terres par le groupe État islamique. Le 10 juin 2014, les djihadistes ont pris le contrôle de Mossoul. Depuis, la plaine de Ninive qui est le berceau de la civilisation assyrienne, se vide de ses derniers chrétiens. À l'initiative de Laurent Fabius, le Conseil de sécurité de l'ONU se réunit aujourd'hui pour évoquer la protection des communautés chrétiennes, mais aussi yazidies ou shabaks, toutes menacées par Daech. De passage en France, à l'invitation de l'association Fraternité en Irak, Mgr Petros Mouché appelle la communauté internationale à protéger les minorités d'Irak et endiguer leur exode par des actes concrets.
LE FIGARO. - Après huit mois de crise, quelle est la situation des réfugiés dans le Kurdistan irakien?
Mgr Petros MOUCHÉ. - Sur place, la vie est très difficile. Nous vivons dans des camps, dans les écoles ou des bâtiments vides. Nous manquons des biens les plus élémentaires. La promiscuité et le manque d'hygiène propagent des épidémies. Les familles qui louaient des maisons, à Erbil ou ailleurs, n'ont plus de quoi payer le loyer et risquent de se retrouver dehors. Elles n'ont plus de revenus, et leur argent est bloqué sur leurs comptes en banque. Mercredi, j'ai encore reçu un appel de la ville de Shaqlawa où une trentaine de familles habitent toujours dans l'église, et nous n'avons aucune solution de relogement qui leur permettrait de libérer les lieux.
La situation s'enlise...
Exactement. Au début de la crise, nous espérions rentrer vite chez nous. Mais les mois passent et rien ne change. Nos villages n'ont toujours pas été libérés, Daech est toujours là. Dans ces conditions, les familles continuent de fuir le pays.
Quels sont vos besoins les plus urgents?
Nous devons penser à nos enfants. Ils ne peuvent pas aller dans les écoles kurdes car ils ne comprennent pas la langue. Nous ouvrons nos propres écoles dans des maisons qu'on loue, mais cela coûte très cher. Rien que pour le transport des écoliers, cela représente un budget de 190. 000 dollars pour l'année scolaire. Les besoins en santé sont aussi très importants. Les opérations chirurgicales doivent se faire dans des hôpitaux privés, car les réfugiés ne comprennent pas le kurde, ce qui les exclut de fait des hôpitaux publics.
L'exode des chrétiens a-t-il atteint un point de non-retour?
Je ne l'espère pas, mais la situation est catastrophique. Sur les 12 000 familles de mon diocèse, plus de 4 000 ont déjà quitté le pays depuis cet été, soit un tiers de la communauté! J'ai 1 300 familles en Jordanie, 1 400 au Liban, une centaine en Turquie, presque mille personnes en France... Et l'hémorragie se poursuit. C'est dramatique car mon diocèse représente un tiers de l'Église syriaque, qui compte 150. 000 personnes dans le monde entier.
L'intégralité de l'interview est à lire dans notre édition abonnés.
Envoyé de mon Ipad
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