Irak : "Ils font ça parce qu'on est chrétiens, c'est tout"
Dans l'avion de l'exil qui les conduit jeudi en France, pour un voyage sans retour, deux réfugiés chrétiens d'Irak racontent la peur, la terreur, les menaces qu'ils ont fuies, avec l'avance vers leurs villes des djihadistes de l'État islamique. "Bien avant leur arrivée, j'avais reçu trois menaces directes, sur mon téléphone portable", dit à une journaliste de l'AFP René, la cinquantaine, qui n'accepte de révéler que son prénom. "Il y a huit ans, j'avais déjà dû quitter Mossoul, où nous les chrétiens n'étions plus en sécurité, pour me réfugier à Qaraqosh", la plus grande ville chrétienne d'Irak, dans le nord, raconte l'homme dans un bon français.
"Quand ils sont arrivés aux portes de la ville, nous sommes partis pour Erbil, où nous avons été accueillis par le gouvernement kurde, qu'il en soit remercié", dit-il. "Les djihadistes violent les femmes, les filles, kidnappent les gens, c'est très dur. On a des amis, des musulmans, qui sont très gentils, mais eux, on ne sait pas pourquoi ils font ça. Parce qu'on est chrétiens, c'est tout. Il y a beaucoup de chrétiens qui veulent venir en France ou en Europe, parce que c'est impossible de vivre avec les gens qui nous haïssent. Nous sommes humiliés, persécutés, on ne peut plus vivre comme ça", déclare René.
"On va recommencer à zéro, c'est dur, mais ce sera mieux pour nous que de vivre toujours sous la menace, dans l'insécurité, toujours, à Qaraqosh, à Mossoul, en Irak." Rajhad, professeur d'anglais de 31 ans, refuse elle aussi de donner son nom de famille. Comme René, elle a fui en panique l'avance vers Qaraqosh, laissant derrière elle ses diplômes, ses souvenirs, toute sa vie. "Déjà en 2005, à l'université de Mossoul, ils m'avaient menacée et obligée à porter le voile, parce que c'était le ramadan. Je l'ai porté pendant deux semaines, si je ne l'avais pas fait, ils m'auraient tuée."
"Ils veulent nous forcer à nous convertir"
"Ils sont effrayants, ils veulent nous forcer à nous convertir, nous transformer en musulmans", dit-elle. "Parce que nous sommes chrétiens, ils veulent nous tuer. Si nous étions restés, nous avions le choix entre nous convertir ou leur payer un impôt, tous les mois. Nous avons tout quitté en quelques heures, c'était horrible. La France est notre dernière chance, nous n'avons plus rien, plus de maison, plus de travail, nous avons tout perdu. J'étais professeur, d'anglais, désormais je ne suis plus rien." Avec René et Rajhad, ils étaient une quarantaine, tous des chrétiens, à avoir reçu jeudi du consulat de France à Erbil un visa pour la France.
Ils ont été accueillis dans le salon d'honneur de l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle par le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius, qui a souligné que ces réfugiés étaient des "personnes menacées dans leur vie". Il a ajouté que Paris privilégiait "ceux qui ont un possible lien avec la France". "Les gens qui sont ici, certains ont de la famille même s'ils ne l'avaient pas vu depuis 10-15 ans", a ajouté le chef de la diplomatie française. "Plusieurs centaines" d'autres visas vont être accordés dans les prochaines semaines, a-t-il ajouté. L'avion qui les a conduits en France avait livré à l'aller 21 tonnes d'aide humanitaire destinée aux dizaines de milliers de personnes ayant fui l'offensive djihadiste sur le nord de l'Irak.
Envoyé de mon Ipad
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