Durant les fêtes de Pâques, le pape François a évoqué « l'immense tragédie humanitaire en Syrie et en Irak ».
Il a appelé à la fin des tragédies et des persécutions dans un climat de violences dans le monde au nom de la religion.
Pierre Servent, spécialiste des questions de défense et de stratégie revient sur la difficulté de protéger les chrétiens d'Orient.
« En théorie, il pourrait y avoir trois possibilités. Premièrement, on envoie les chrétiens d'Orient au Liban, en Turquie ou ailleurs. Cela paraît impossible, y compris si l'on considère les capacités d'accueil de ces pays.
Deuxièmement, on les protège in situ. Dans ce cas, il faudrait un très grand nombre de soldats avec des postures guerrières assez musclées pour pouvoir les protéger. Il faudrait éviter que se reproduise ce qui s'est passé en Bosnie dans les poches bosno-musulmanes en territoire à majorité serbe. Les casques bleus de la Forpronu devaient protéger un certain nombre d'entre elles, mais à Srebrenica, cela s'est terminé par l'exécution de 7 000 hommes et jeunes hommes. Et les autres poches ont été impossibles à défendre.
> Lire les témoignages de chrétiens d'Orient réfugiés à Beyrouth : Le Liban, refuge précaire des chrétiens d'Orient
Manque de troupes pour une protection onusienne
L'ONU n'a pas suffisamment de troupes. Et les casques bleus sont souvent dans des positions difficiles pour combattre, même si le président Chirac a fait évoluer le concept pour que l'on arrête de les attacher comme des chèvres à un piquet pour qu'ils se fassent dévorer…
Ainsi, au Mali, il y a, aux côtés des Français, la Minusma, une force de l'ONU beaucoup plus musclée. En Irak, l'armée – 250 000 hommes – n'est pas en mesure de protéger les chrétiens, parce qu'elle a été complètement désorganisée l'été dernier et elle est en cours de reconfiguration.
Troisième solution : faire bouger les différentes populations menacées, notamment les chrétiens qui ont fui Mossoul, mais aussi les Yézidis, visées par les djihado-terroristes et les chiites, pour les regrouper dans des endroits, en Syrie ou en Irak, où on pourrait les défendre.
> À lire : Face aux « chrétiens persécutés », le pape ne veut ni violence ni inertie
Une protection qui serait très coûteuse
Je n'en vois pas la faisabilité, d'autant plus que très souvent ceux qui sont restés veulent rester. On ne va pas les bouger de force, rajoutant la force à la violence ambiante.
L'exclusion aérienne n'est pas envisageable non plus parce que le califat terroriste de Daech n'utilise pas d'avions de combat. Il a des combattants prêts à se faire sauter, à coups de mines et d'explosifs.
Enfin, il faut tenir compte de l'aspect financier. Déployer des soldats coûte de l'argent que personne n'est prêt à mettre. Les contributeurs de l'ONU, et notamment les Américains, sont de plus en plus réticents, et la France déjà très engagée est limitée sur le plan budgétaire. Cet ensemble de facteurs fait que techniquement, sur le plan militaire, je ne vois pas de solution immédiate. »
Recueilli par Agnès RotivelEnvoyé de mon Ipad
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